NATUROTHÉRAPIE, UNE MÉDECINE INTÉGRATIVE
Si la Naturothérapie a pu prendre son envol il y a quelque 30 ans à Bobigny, si elle s’apprête aujourd’hui à vivre un nouvel élan, c’est précisément parce qu’elle peut prendre appui sur l’héritage de la Naturopathie et en même temps parce qu’elle peut s’inviter légitimement et logiquement dans le concert des Médecines dites intégratives.
Qu’est-ce qu’une médecine intégrative ?
Pourquoi la Naturothérapie, plus que tout autre, peut revendiquer cette qualité ?
Le concept de Médecine Intégrative n’est pas l’œuvre d’un individu en particulier. Il émerge plutôt d’un mouvement collectif qui s’est développé il y a quelques décennies aux EU et au Canada et qui a été popularisé par certains auteurs, le plus célèbre étant Andrew Weil. L’idée de base de l’approche intégrative est très simple : utiliser, combiner des traitements conventionnels et non conventionnels. En Europe, la Médecine Intégrative se développe lentement et diversement suivant les pays.
Nous sommes très attachés, au sein du collectif Idenat, au concept de médecine intégrative, et il est devenu pour nous évident qu’il s’inscrivait bien au-delà d’une simple ouverture aux soins complémentaires, d’autant plus qu’il a lui-même très vite évolué et s’est quelque peu musclé.
Nous pouvons aujourd’hui adopter cette nouvelle définition: « La médecine intégrative est un modèle médical qui propose des traitements multidisciplinaires à l’aide d’outils diagnostics et thérapeutiques multiples dans le respect des choix du patient et de ses particularités ».
Avec la Naturothérapie, le concept de médecine intégrative peut être décliné sur de nombreux plans. En voici un échantillonnage.
1/ Le 1er exemple
Il nous permet de rappeler cette idée que pour bien comprendre une science, ou même une méthode, il faut d’abord bien connaître son histoire. C’est toujours un grand bonheur que d’intégrer le savoir de tous ceux qui nous ont précédé, médecins ou non. Nos aînés ne connaissaient ni la méthodologie scientifique ni le vocabulaire scientifique. Ils parlaient simplement avec les mots de leur temps mais ils savaient faire preuve de bon sens.
Toutes le époques ont eu leurs Diafoirus ? Bien sûr.
Plusieurs tomes ne suffiraient pas pour éditer le Grand Bêtisier de la médecine ? Sans doute.
Des secteurs de la Naturopathie méritent d’être dépoussiérés ? Certainement.
Et alors ? Il n’empêche que nos Anciens nous ont légué quelques pépites.
2/ Le 2e exemple
Il concerne la Physiologie, sur laquelle la Naturothérapie prend toujours appui. La Physiologie est elle-même en perpétuelle évolution, puisqu’elle intègre des données issues de différents systèmes, pour former ensuite, à travers plusieurs niveaux d’organisation, une image toujours plus claire, toujours plus précise, toujours plus cohérente de l’organisme vivant. Disons les choses autrement : avec la physiologie telle qu’elle est enseignée aujourd’hui, nous sommes obligés de prendre conscience de l’interdépendance, pas seulement de nos cellules, mais aussi de tous nos organes, de toutes nos fonctions. C’est ainsi que s’impose progressivement le concept de Grande Connexion, la PNEI (Psycho-Neuro-Endocrino-Immunonogie).
La physiologie humaine ne se contente plus d’étudier les grandes fonctions (de nutrition, de reproduction, de locomotion …). Elle étudie aussi les interactions de l’organisme avec notre environnement.
Vous comprendrez alors pourquoi nous avons placé en bonne place dès la 1ère année l’enseignement de la Systémique.
La Systémique s’est construite progressivement dans la seconde moitié du 20ème siècle, en opposition avec la tradition analytique cartésienne qui consiste à découper le tout en parties indépendantes, à tout décomposer en pièces détachées. Cette façon de voir est plutôt réductrice et elle montre très vite ses limites pour appréhender la réalité. A l’opposé, la Systémique, en prenant en compte les interactions d’un organisme avec son environnement, en faisant apparaître de nouveaux concepts, de régulation d’abord, d’auto-organisation ensuite, se révèle bien plus performante pour appréhender les systèmes complexes, comme peut l’être l’organisme humain.
Conséquence de taille : la Naturothérapie, ainsi adossée à cette physiologie « new look », dispose de tous les atouts pour évoluer et vivre avec son temps. Nous pouvons même aller plus loin et avancer qu’elle est structurellement prête pour intégrer, en plus des savoirs du passé, des savoirs modernes sans oublier ceux qui nous attendent dans le futur tant sur le plan diagnostic que thérapeutique.
3/ Le balayage multifactoriel
Il a été, un élément-clé de la méthodologie mise en place dès le départ, à Bobigny, il y a plus de 30 ans.
Le Naturothérapeute, face au patient essaiera de ne rien oublier, d’être le plus global possible. Il s’intéressera à tout ce qui fait la relation de l’individu au monde en prenant en compte tous les facteurs qu’ils soient hygiéno-diététiques, environnementaux et bien sûr psycho-émotionnels.
4/ Les outils diagnostiques
Les Anciens faisaient des bilans de santé en se contentant des 5 outils traditionnels que sont les 5 sens (écouter, observer, toucher, sentir, goûter) ; l’objectif de ces bilans étant d’évaluer pour chaque patient aussi précisément que possible son potentiel de vie et, en même temps, d’identifier ses fragilités.
Il n’y a aucune raison pour que le Naturothérapeute d’aujourd’hui néglige les outils modernes que sont l’imagerie et surtout la biologie qui s’est développée spectaculairement depuis quelque temps. Je reconnais qu’il peut utile de disposer de certaines informations pour pratiquer une médecine encore plus personnalisée.
Citons quelques exemples.
- Avec un bilan des intolérances alimentaires, nous pouvons connaître la liste des aliments qui peuvent parasiter notre vie quotidienne et qu’il vaut mieux éviter provisoirement.
- Un typage lymphocytaire ou un profil protéique peuvent être utiles pour apprécier l’efficacité de notre SI.
- Une sérologie virale nous dira si tel ou tel virus est dormant ou en état de réactivation.
- Qui n’a pas envie de savoir s’il est concerné par la maladie de Lyme ? ou une candidose chronique ?
- De plus en plus de femmes ont envie de savoir si elles possèdent la mutation des gènes BRCA1 et BRCA2 qui les prédisposeront à faire un cancer du sein ou de l’ovaire. C’est ainsi que l’actrice américaine Angelina Jolie a fait le choix « radical » de la mastectomie préventive.
J’arrête là et je n’ai pas parlé des séquençages haut débit traités par des algorithmes surpuissants qui permettent d’établir de nombreux liens entre des gènes, des pathologies et parfois des possibilités thérapeutiques. Le catalogue des bilans proposé par certains laboratoires est impressionnant au point que certains praticiens proposent des traitements uniquement à partir de bilans biologiques.
J’avoue ma perplexité. En général, çà coûte cher et tout le monde ne peut pas suivre. Est-ce fiable ? Qu’est-ce que cela apporte vraiment quelque chose ? Quel avenir cela nous promet-il ?
5/ Sur le plan thérapeutique
L’époque moderne a vu émerger de nouvelles exigences de santé. Patients que nous sommes ou que nous serons un jour, nous avons tous envie de guérir rapidement, que les symptômes gênants disparaissent, et que l’existence dure plus longtemps.
Face aux exigences de ses patients, et en fonction de sa formation et de sa sensibilité, tout thérapeute est bien aise de disposer de tout un éventail de techniques et de recettes naturelles, dont il a la maitrise, et si possible rapides et efficaces, vérifiant de surcroît, cela va de soi, le célèbre et toujours actuel « primum non nocere ».
Le praticien de médecine intégrative utilise tous les savoir-faire disponibles là où ils sont performants. Ses outils thérapeutiques sont empruntés à des disciplines différentes ou à des traditions différentes. Il peut en effet et à loisir puiser dans un vivier qui s’enrichit régulièrement avec la nutrition et la micronutrition, la phytothérapie, l’aromathérapie, l’homéopathie, l’acupuncture, l’ostéopathie, la chromothérapie, les psychothérapies, l’hypnose, la médecine chinoise, la médecine ayurvédique… La liste est interminable.
L’idée de faire coopérer les différentes spécialités médicales sur un même malade a fait son chemin. Aujourd’hui, l’approche multidisciplinaire de pathologies chroniques est une évidence dans les centres de soin.
Cette diversité, cette abondance de pratiques peut être vue comme une richesse pour le patient, quand elle débouche sur une coopération.
A l’inverse, cette situation peut rendre le choix difficile pour les personnes en recherche de soins complémentaires. Cette diversité peut même être un handicap si elle débouche sur une dispersion de pratiques qui ne sont pas toujours cohérentes entre elles et ont parfois des effets antagonistes.
Autre problème : cette abondance de pratiques (qui, par ailleurs fascine et a toujours fasciné) peut ainsi détourner le patient des facteurs naturels de santé.
Le Naturothérapeute privilégiera évidemment les facteurs naturels de santé et les méthodes naturelles.
Dans tous les cas, le Naturothérapeute s’efforcera de mettre en place d’abord un traitement étiologique, et pas seulement un traitement symptomatique où il suffirait de remplacer un médicament chimique de synthèse par un remède naturel.
6/ Avec les outils de la psychologie et de la communication,
Nous abordons le 6ème et dernier point pour illustrer ce concept de médecine intégrative. Ces outils vont nous permettre d’entrer de plein pied dans un domaine trop longtemps négligé dans les études médicales en général : la relation thérapeute-patient.
Cette dernière partie devrait vous convaincre que la Naturothérapie ne se résume pas à un empilement de techniques et autres recettes.
Voici quelques idées-forces qui sont développées dans notre enseignement :
- Exigence de santé pour le soignant lui-même. La Naturothérapie et la démarche intégrative encouragent le soignant à explorer son propre équilibre de santé, ce qui lui permettra de mieux comprendre, de mieux intervenir auprès de ses patients. Le 1er patient du Naturothérapeute doit donc être lui-même.
- S’il est important de prendre en compte tous les aspects évaluables pour identifier un individu unique que nous allons soigner, il est néanmoins prioritaire de considérer un être dans sa subjectivité, pour entendre ce qui lui pose problème, l’objectif qu’il souhaite atteindre et finalement composer avec lui un programme thérapeutique.
- L’univers du patient étant par définition différent de celui du thérapeute, y pénétrer n’est pas chose aisée. Il est préférable de procéder par la douceur, quitte à demander la permission, en maitrisant au mieux les outils de la communication, plutôt que de se comporter à la hussarde. Prenons un exemple : si nous tombons sur un blocage qui « résiste », évitons de passer en force, respectons-le. Essayons alors de faire prendre conscience, de faire émerger ce point de blocage, même si çà prend un peu de temps.
- Face aux exigences du patient, le thérapeute est souvent impatient de proposer tout de suite des solutions qui lui semblent évidentes. Il doit d’abord apprendre à accueillir la problématique de son patient. Il écoute, certes, mais avec empathie et sans jugement.
- Le thérapeute doit aider le patient à se responsabiliser, à prendre en charge d’abord sa santé, ensuite le traitement qu’on lui propose. Il faut comprendre que si le patient a l’impression de ne pas avoir été écouté dans sa problématique, il ne saura pas en retour « écouter », accueillir le traitement qu’on lui propose.
- Il apparaît à travers ces quelques modestes réflexions, que la communication passe essentiellement par le langage dont c’est la 1ère mission, la plus évidente mais pas la seule.
N’oublions pas que la façon de dire les choses influence aussi nos comportements, qu’elle conditionne aussi notre vision du monde. C’est la raison pour laquelle nous commençons le cursus des 3 ans par un séminaire intitulé « Sémantique Générale » qui pourrait tout aussi bien s’intituler « De la pensée classique à la pensée complexe »….Nous avons commencé à effleurer le sujet il y a quelques minutes avec la Systémique…..
Au total, si nous nous adressons plus particulièrement à ceux qui pourront être tentés un jour de s’inscrire à la formation de Naturothérapie, nous insisterons, au cours de ces années qui vont vite passer, sur la mise en place d’une trame méthodologique. Il est important, pour soigner, de pouvoir s’appuyer sur une méthodologie à la fois souple et rigoureuse, la plus claire possible. C’est ce qui semble souvent manquer quand on démarre dans la profession. On a ensuite toute la vie pour remplir les petites cases au cœur de ce canevas, en glanant çà et là des recettes, des trucs et autres ficelles de métier.
Néanmoins, au-delà des réponses toutes faites, il est précieux de développer son esprit critique, de cultiver en permanence l’art du questionnement. Quand on fait le choix d’entrer en Naturothérapie, il faut accepter d’être dérangé, dans ses habitudes, dans ses convictions et surtout dans ses préjugés. Toujours. Toujours.